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Deuxième série Deuxième série
À une Française venue à l'Ashram en 1937, à l'âgé de soixante-six ans. Elle y a fait de nombreux séjours de durées inégales jusqu'en 1941.
Rien n'est inéluctable. À chaque moment l'intervention d'un plan supérieur dans le plan matériel peut changer le cours des circonstances. Mais en l'espèce, le conflit a lieu entre la très puissante construction mentale de la pensée médicale, et la foi en la Grâce divine. Le pouvoir de la suggestion médicale réside dans le fait qu'elle s'insinue dans le subconscient et agit de là sur le corps, même à l'insu de la pensée consciente, si cette pensée n'a pas coutume de fouiller dans le subconscient avec la vigilance d'un détective. Alors voilà... je ne puis pas vous promettre que votre foi en la Grâce sera assez intense et inébranlable pour triompher de l'effet néfaste des suggestions médicales ; et je ne me sens pas le droit de vous dire : "ce n'est rien", quand tout dans votre conscience matérielle vous crie : "danger!..." Soyez assurée que notre aide et nos bénédictions sont toujours avec vous. 24 mars 1937
Certainement, nous vous garderons avec plaisir jusqu'au mois de juin. Vous avez bien raison de dire que les portes closes sont un effet de l'imagination. La volonté de passer a toujours le pouvoir de les ouvrir, comme la certitude de la victoire ensoleille la route... 12 avril 1937
Certainement, quand vous serez prête à revenir, après avoir fait pour votre fils ce que vous voulez faire, vous n'aurez qu'à Page – 183 nous prévenir et nous serons heureux de vous recevoir. Dans le calme et la paix intérieurs, dans une ardente aspiration vers le Divin, se trouve la meilleure préparation pour recevoir l'aide que nous pouvons donner et que vous pouvez être certaine de recevoir de nous. 29 avril 1937
Les brusques conversions ne sont, généralement, ni intégrales, ni durables ; ce sont des coups de foudre qui le plus souvent se réduisent en fumée... L'effort lent et régulier, le progrès poursuivi avec persistance, sont plus sûrs, "piano ma sano..." Et certainement le souvenir des activités du sommeil n'est pas indispensable à la découverte de l'âme. Je suis heureuse que vous vous sentiez bien. Sûrement, notre aide et notre protection sont toujours avec vous. 12 mai 1937
Il ne faut pas se laisser écraser par le sens de l'immense ; il faut s'y baigner, au contraire, avec joie et sérénité. Si l'on était inévitablement enfermé entre les quatre murs de sa conscience personnelle, c'est alors que ce serait triste et écrasant... mais l'infini nous est ouvert, nous n'avons qu'à nous plonger en lui. 29 mai 1937
Sri Aurobindo a lu votre lettre et dit comme moi qu'il est difficile de faire des projets si longtemps à l'avance, à cause de l'imprévu des circonstances. Pourtant un fait est acquis, c'est que Sri Aurobindo vous a acceptée comme disciple ; qu'il vous ait donné un nouveau nom en est une preuve suffisante. Mais d'être un disciple n'implique pas nécessairement qu'on vive à l'Ashram. En fait, il y a plus de disciples en dehors que dans l'Ashram. Pour vivre dans l'Ashram un certain nombre de conditions sont nécessaires, Page – 184 parmi lesquelles une santé suffisante pour permettre de se conformer à la discipline de l'Ashram qui ne prévoit pas d'arrangements spéciaux de régime,, de services, etc. Ces arrangements peuvent être faits, pour un temps donné, pour des visiteurs ; mais il est impossible, pour plusieurs raisons, de les rendre permanents; Quand donc vous serez sur le point de revenir (trois ou quatre mois à l'avance) il faudra nous prévenir pour que nous voyions si quelque chose de pratique peut être combiné. Pour ce qui est des lectures, il me semble qu'il vaut mieux, pour le moment, ne pas vous imposer cette fatigue. Les quelques leçons particulières que vous donnez me paraissent être suffisantes. Je suis heureuse de vous savoir remise et espère que vous vous porterez de mieux en mieux. 5 juillet 1937 r
Je regrette que vous ayez été triste ces jours derniers. Il ne fallait pas... La Lumière devrait toujours apporter avec elle la joie d'un progrès nouveau. Maintenant, je pense que tout va bien. 10 juillet 1937
Ne vous tourmentez pas. Vous n'avez fait aucune faute ni consciemment, ni inconsciemment. Je faisais allusion à un ensemble de circonstances extérieures et intérieures, un ensemble de circonstances qui est la conséquence inévitable de l'ensemble précédent, et ainsi de suite... Seul le pouvoir yoguique, le pouvoir de la Conscience divine peut rompre cette chaîne des conséquences. Il faut partir le cœur plein de paix et la pensée pleine d'espoir. Il faut partir avec la certitude que notre aide et notre force vous accompagneront, et que nos bénédictions sont et seront toujours avec vous. 14 septembre 1937 Page – 185 (À la fin au mois de septembre 1937, la disciple est retournée en France. Elle revint à l'Ashram en mars 1938 pour repartir en 1941.)
Ne craignez rien ; je peux voir derrière les apparences et comprendre dans le silence ou derrière les mots. Mon bras sera toujours là pour vous entourer, vous soutenir et vous guider. Certainement vous êtes mon cher enfant, mais je le veux heureux, non douloureux, illuminé, non pas ignorant... Mes bénédictions sont avec vous très affectueusement. 13 juin 1938
Ne vous ayant pas vue au pranâm, j'allais vous écrire pour vous demander si la grande fatigue dont vous me parliez dans votre lettre d'hier, en était la cause. Et maintenant je reçois votre lettre de ce matin. Quel dommage que vous ayez eu la fièvre ! Mais pourquoi ? Pas de raison apparente ? En tout cas j'espère que ce sera bien vite fini. Il va de soi que notre aide et notre force, notre protection et nos bénédictions sont toujours avec vous ; il faut vous y plonger comme on plonge dans un bain réconfortant qui guérit. J'y joins ma tendresse. 17 juillet 1938
Il m'est difficile de répondre à votre question parce que je n'ai pas d'expérience personnelle de l'urotropine et de ses effets. Mais d'une façon générale il me semble que lorsqu'on se fait soigner par un docteur, il faut faire ce qu'il dit. C'est dans le cas de névrite que l'urotropine est, paraît-il, contre-indiquée. Vous pourriez demander au docteur l'assurance que vous n'avez pas de névrite, ce qui est peu probable. Notre aide et nos bénédictions sont toujours avec vous, affectueusement. 20 juillet 1938 Page – 186 Cette "aspiration dans le physique"¹, avec nos bénédictions et toute mon affection. Ne vous laissez pas affecter par des mots de docteur. Les maladies ne sont sérieuses que si l'on accepte qu'elles le soient. D'ailleurs je m'attends à apprendre bientôt que vous êtes guérie. 24 juillet 1938
Voici un peu de "nouvelle naissance"². En effet, quel meilleur usage peut-on faire d'une maladie, si ce n'est d'en profiter pour rentrer profondément au-dedans de soi et s'éveiller, naître à une nouvelle conscience plus lumineuse et plus vraie. Notre aide et nos bénédictions sont toujours avec vous, affectueusement. 28 juillet 1938
Nous sommes d'avis, Sri Aurobindo et moi, qu'il serait plus sage que vous attendiez une semaine de plus avant de venir au pranâm. Quant à la méditation deux fois par jour, ce ne sera possible que lorsque vous ne serez plus du tout faible, car il y a beaucoup de monde en ce moment et l'atmosphère physique est un peu épaisse à respirer. Nous vous demandons donc d'avoir encore un peu de patience pour laisser aux forces matérielles le temps de revenir. Notre aide et notre protection sont avec vous pour cela. En toute affection. 26 août 1938
Je ne me souviens pas du tout dé vous avoir parlé de passages dans lesquels Sri Aurobindo prophétisait les événements actuels. Je vous parlais de certaines pages où Sri Aurobindo donne un aperçu très succinct de son Œuvre présente sur terre,
¹Aspiration dans le physique : nom donné par la Mère à la fleur ixora coccinea "Banduca" (Ixora écarlate). ²Nouvelle naissance : oreganum majorana (Marjolaine). Page – 187 de son Œuvre de divinisation de la matière et je vous ai dit que cela est suggéré dans un des chapitres de "Thoughts and Glimpses" [Aperçus et Pensées]. 20 septembre 1938
Ne vous tourmentez pas. H y a fort longtemps que vous m'avez dit — dans le silence — ce que vous venez de me "confesser" ce soir. Et je vous ai toujours répondu la même chose : ne vous tourmentez pas. Tous les dons ne sont pas nécessairement matériels — et le don de soi n'est-il pas le plus beau de tous? 29 septembre 1938
Ce sont les réflexes spontanés qui révèlent le subconscient. En suivant ces spontanéités à la piste on peut, petit à petit, se frayer une route dans la forêt vierge du subconscient et y amener la Lumière. Ne vous tourmentez pas et surtout ne soyez pas triste ! Le 12, la dose était probablement un peu trop forte et, en conséquence, la digestion un peu difficile. Il n'y a qu'à se tenir tranquille, très tranquille, et tout se tassera. Alors la Lumière fera sa réapparition, plus belle et brillante que jamais. Ne craignez pas, rien ne peut avoir le pouvoir de vous éloigner de moi, puisque je suis toujours avec vous — en vous. Affectueusement. 13 novembre 1938
Mère, Je n'ai pas pris le médicament conseillé par le Dr X. Je ne l'ai pas fait pensant que puisque je vous écrivais, je ne ferai rien sans vous. Devrais-je écrire au Dr Y. à Paris pour lui demander son avis ?
Il vaudrait mieux, en effet, ne rien prendre sans l'avis de votre docteur de Paris. Page – 188 Devrais-je peut-être prendre l'avis du docteur homéopathe ? Je ne le connais pas.
Non, pas nécessaire ; le moins de docteurs possible, le moins de médicaments possible ! !
Z. me conseille vivement de prendre de la "génaspirine". Je résiste, ne prenant jamais de calmant. Elle dit que ce n'est pas un "calmant", mais un "décongestionnant". Je n'y comprends rien et lui ai dit que je vous demanderai.
Oh ! non, pas de drogues. Plus vous vous droguez, plus vous affaiblissez la résistance naturelle de votre corps. Pour diminuer une tension, dix minutes de calme véritable intérieur et extérieur sont plus efficaces que tous les remèdes du monde. Dans le silence est l'aide la plus efficace. Avec nos bénédictions. 30 janvier 1939
Pour dire la vérité, je crois que le docteur a raison et que c'est nerveux. Je veux dire que c'est un trouble fonctionnel et non un trouble organique. Que vous ayez mal à la tête n'est pas une preuve du contraire, car on peut avoir un mal de tête nerveux, et en souffrir beaucoup. En tout cas, nerveux ou pas, il est de toute évidence que si vous étiez constamment en contact avec le Divin, vous seriez tout à fait bien. Nos bénédictions sont toujours avec vous. En toute affection. 9 février 1939
Ce serait si bon de ne pas prendre de piqûre ! N'est-ce pas ? Quant au reste, ne vous tourmentez pas. La Grâce divine n'est-elle pas derrière toute chose, même les manquements, et par elle, il n'est rien dont on ne puisse faire une occasion de progrès. Page – 189 Nos bénédictions sont toujours avec vous. 23 mars 1939
Comme vous vous tourmentez... pour rien ! Je savais fort bien que vous alliez dîner chez le banquier et n'y ai rien trouvé à redire, pas plus qu'à vos petites réunions musicales, ni à aucune chose du même genre. J'ai toujours considéré que vous êtes libre de voir qui vous voulez et d'aller où vous voulez. Une seule fois je vous ai donné un conseil à ce sujet — mais ce n'était qu'un conseil, rien de plus et portant sur un seul cas, très précis. Je vous envoie ce mot, en hâte, dans l'espoir qu'il vous apportera la paix et la tranquillité que je vous souhaite toujours. Mes bénédictions sont avec vous sans cesse. 3 mai 1939
Ma chère petite X., Si vous voulez ma vraie façon de voir les choses, je vous dirai qu'il vaut mieux prendre une bonne dose de foi et de confiance en la Grâce Divine, que toutes les pilules et piqûres du monde. Avec mes bénédictions, toujours auprès de vous. 7 juillet 1939
Ma pauvre petite X., Je suis vraiment désolée d'avoir à vous désappointer, mais l'entrevue désirée ne pourra sûrement pas avoir lieu avant la fin de la guerre. D'ailleurs pour la croissance intérieure je ne crois pas à la nécessité des mots. Dans le silence toute l'aide est là à son maximum de puissance. Tendresses et bénédictions. 6 septembre 1939
Ma petite X., Il est impossible de méditer avec quelqu'un sans recevoir quelque chose des vibrations qui émanent de cette personne, Page – 190 de même qu'on ne peut pas aller dans un endroit sans respirer l'air qui s'y trouve. Quand quelqu'un a une atmosphère nuisible et une influence pernicieuse (je vous en avais avertie), il faut s'abstenir soigneusement d'aller, en méditant, se mettre en état de réceptivité dans cette atmosphère-là ! Ce n'est pas une faute, c'est un acte d'ignorance. Et il va de soi que cela n'empêche pas que vous soyez ma petite X. et que mes bras vous entourent et vous protègent. 19 septembre 1939
Pourquoi vouloir rompre le silence ? Le silence est la porte ouverte sur les réalisations spirituelles véritables. Et toujours je suis avec vous. Puisez à ma force dans le silence — elle ne vous manquera pas. Nos bénédictions. 23 décembre 1939
Ma chère petite X., Quand le démon de la jalousie vous souffle quelque suggestion à l'oreille, il faut bien vous garder de l'écouter. Au moment où la guerre a éclaté je vous ai dit que, tant qu'elle durerait, je ne donnerai pas d'entrevues aux "sâdhaks". Ce que j'ai dit, je le fais. Toutes les entrevues régulières sont arrêtées. Quelquefois — pas toujours — je vois un visiteur au moment de son départ. A part cela, pendant tous ces mois, j'ai fait deux ou trois exceptions, dont la vôtre au sujet de vos affaires. Si quelqu'un vous a dit qu'il en était autrement, pourquoi le croire?... Il faut bien vite chasser ces ombres loin de vous et vivre constamment dans la sérénité d'une confiance inébranlable. Je suis toujours avec vous. Lorsque vous écoutez bien, vous entendez mes réponses à vos questions. Quand tout se fera silence et calme au-dedans de vous, vous sentirez ma présence d'une façon concrète, et il n'est pas d'aide plus efficace et plus réelle que celle-là. Page – 191 En toute profonde affection, avec nos bénédictions toujours. 4 mars 1940
Ma chère petite X., C'est entendu pour le 22. Sans doute ce sera vers 5hl/2 en haut de l'escalier... mais dans ces jours d'instabilité extrême, il est difficile de faire des projets si longtemps à l'avance. Il faut vivre au jour le jour, toute la conscience tendue vers le seul horizon lumineux : celui de la Réalisation divine. Nos bénédictions sont avec vous, ainsi que ma tendresse. 5 juillet 1940
Ma chère petite X., L'aridité est généralement le signe d'une trop grande préoccupation de soi (qu'elle soit spirituelle ou matérielle), et, en conséquence, d'un rétrécissement de la conscience qui ne communie plus suffisamment avec les forces divines. Le remède : un don de soi plus total au Divin. Avec mes bénédictions et toute ma tendresse. 8 décembre 1940
Ma chère petite X., Ne vous tourmentez pas ; je voulais dire seulement que vous n'êtes pas encore complètement libérée des liens sociaux... mais cela viendra sûrement, à mesure que la flamme de l'aspiration vers le Divin brûlera de plus en plus ardemment en vous. Avec mes bénédictions et toute ma tendresse. 16 janvier 1941 |